16 mars 2015
Les idées reçues sur l'immobilier
Idée reçue #1: C’est à la portée de tout le monde
De l’avis de l’ensemble des interlocuteurs contactés pour ce dossier, on ne s’improvise pas propriétaire loueur du jour au lendemain: mieux vaut se former. «Il faut savoir dans quoi on s’embarque, prévient Hans Brouillette, directeur des communications et des affaires publiques de la Corporation des propriétaires immobiliersdu Québec (CORPIQ). Une formation apportera une vision globale de tous les tenants et aboutissants de l’aventure, et permettra de se montrer plus prudent.»
Différents organismes, comme la CORPIQet l’Association des propriétaires du Québec (APQ), offrent des formations et des conférences. Certaines portent sur des points précis, comme les développements récents en droit locatif, la fiscalité immobilière ou la gestion courante d’un immeuble. D’autres couvrent des thèmes plus larges, comme le programme d’investissement immobilier de la CORPIQ, qui aborde l’analyse et l’évaluation immobilières, la fiscalité, le financement et le rendement, ainsi que les contrats en droit immobilier.
Il est enfin fortement recommandé de se documenter, mais aussi de rencontrer des gens du milieu, sans aucun doute les mieux placés pour partager leur expérience et donner de précieux conseils.
Réseauter
Ne perdez pas de vue qu’assister à des conférences et à des formations, c’est aussi l’occasion de nouer des contacts intéressants. Certains organismes proposent même des activités de réseautage, à l’instar du Club d’investisseurs immobiliers du Québec. «Nos événements mensuels attirent des centaines de personnes. Parmi elles, des investisseurs débutants, mais aussi des investisseurs qui ont fait fortune et qui ne demandent pas mieux que de partager leur savoir», détaille Jacques Lépine, président fondateur du Club. Vous pouvez aussi utiliser les médias sociaux en ligne. LinkedIn, par exemple, regorge de groupes de discussion. Inscrivez-vous, présentez votre projet, posez vos questions… un compte de base gratuit vous suffira.
Idée reçue #2: C’est pas fatigant
Pour beaucoup, louer des appartements signifie amasser des revenus réguliers sans rien faire, ou si peu… Minute! «Selon moi, trop de personnes négligent la compréhension de leurs droits, et surtout de leurs obligations en tant que propriétaires. Pourtant, ça évite les mauvaises surprises en cours de route!» insiste Martin Messier, président de l’APQ. Il rappelle notamment que le propriétaire doit «procurer la jouissance paisible du logement» à son locataire, selon l’expression légalement consacrée. Cela signifie qu’il est responsable du bon état du logement, ainsi que de faire cesser toutes les situations susceptibles de troubler la tranquillité de son occupant, comme des voisins trop bruyants, des problèmes d’humidité ou un ascenseur qui grince.
Et ce n’est pas tout: côté communication, il faut se montrer béton. «On croit que l’immobilier, c’est des briques et du mortier, mais il faut aimer les gens avant tout», estime le propriétaire Jean-François Bigras, propriétaire de 300 logements, à Montréal et à Joliette notamment. À ses yeux, c’est tout un art de savoir dire non, demander un changement de comportement ou parler augmentation de loyer. Surtout quand on est propriétaire occupant, c’est-à-dire qu’on vit auprès de ses locataires. «Cela implique une relation complexe et souvent ambiguë voisin/client. Or, il est important de comprendre qu’on va vivre un lien d’affaires», conseille-t-il.
Il faut aussi se montrer très disponible: en cas de pépin, vous devrez réagir vite. Êtes-vous un tant soit peu bricoleur, ou bien devrez-vous systématiquement faire appel à un professionnel quand il y aura quelque chose à réparer? «C’est exactement la même chose qu’un commerce. Et comme avec un commerce, on doit non seulement faire preuve d’excellentes habiletés relationnelles, mais aussi être très présent», résume Hans Brouillette, directeur des communications et des affaires publiques de la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec (CORPIQ).
Idée reçue #3: C’est forcément rentable
La rentabilité n’est pas si facile à atteindre, figurez-vous! En cause, plusieurs facteurs, à commencer par une mauvaise évaluation du projet en amont et le contexte économique actuel. Les experts du milieu constatent en effet qu’aujourd’hui, de nombreuses personnes achètent des immeubles à un prix beaucoup trop élevé en comparaison avec les revenus qu’ils tireront de la location. «Or, la valeur d’un immeuble locatif dépend justement de sa capacité à générer un revenu net», rappelle Hans Brouillette, directeur des communications et des affaires publiques de la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec (CORPIQ). À ses yeux, les tendances actuelles du marché exigent encore plus de vigilance de la part des investisseurs: «Les prix des immeubles ont connu une explosion ces dernières années, tandis que la croissance des revenus n’a pas suivi et que les coûts d’exploitation n’ont cessé d’augmenter.» Résultat: les taux de rendement sont, globalement, plutôt faibles en ce moment, quand ce n’est pas carrément négatifs.
Face à cette situation, beaucoup se disent que s’ils ne font pas d’argent avec la location, ils en feront à la revente de l’immeuble… Pourtant, nul ne peut prédire comment le marché va évoluer. Qu’arrivera-t-il s’il stagne pendant plusieurs années? S’il dégringole? «On est en haut de la courbe actuellement, et on sait que le marché immobilier, comme la Bourse, connaît des cycles, bien que ses valeurs soient beaucoup plus stables», explique Hans Brouillette.
Il met également en garde contre une sous-évaluation des travaux éventuels à réaliser. «Cet aspect est souvent négligé. Pourtant, on a un parc vieillissant et aucune subvention pour réaliser des travaux majeurs», poursuit-il. Claire-Hélène Gosselin, courtière immobilière pour Via Capitale, abonde dans le même sens: «L’état de l’immeuble est une donnée fondamentale. S’il a été mal entretenu, si les cuisines sont désuètes…, l’impact est direct sur le montant des loyers.» Avez-vous envisagé la possibilité d’investir dans des rénovations? En connaissez-vous le coût? Le retour sur investissement?
Idée reçue #4: C’est pas compliqué à financer
Ben tiens! Selon les différents experts consultés, se donner un an de préparation à ce chapitre n’est pas exagéré. Car budgéter son projet et économiser les sommes nécessaires ne se fera pas à la dernière minute. Par ailleurs, emprunter pour investir dans l’immobilier locatif implique certains critères spécifiques. Ils varient essentiellement en fonction des quatre éléments suivants:
La taille de l’immeuble
Les prêteurs font une distinction entre les bâtiments de un à quatre logements (le «petit locatif»), et ceux de cinq unités et plus (le «multilogements»). Cette division a un impact sur le montant de la mise de fonds et sur les taux proposés. Du côté du petit locatif, la mise de fonds minimale correspond à 20 % du prix d’achat si vous ne résidez pas dans l’immeuble. «Pour une propriété multilogements , les critères sont plus sévères», observe Pascal Laliberté, courtier immobilier et hypothécaire chez PPL Immobilier inc. La mise de fonds devra en effet atteindre 25 % si vous ne prenez pas d’assurance avec la SCHL, mais ne pourra représenter moins de 15 % dans le cadre d’un prêt assuré. En ce qui concerne les taux, ceux du petit locatif sont comparables à ceux d’un prêt hypothécaire résidentiel, tandis que pour du multilogements, il faut s’attendre à ce qu’ils soient un peu plus élevés. Cependant, dans tous les cas, l’amortissement maximal est de 30 ans.
Votre «statut» de propriétaire occupant ou non
Ce critère s’applique au petit locatif uniquement. Si vous êtes propriétaire occupant, la mise de fonds passe à 5 % pour une maison intergénérationnelle ou un duplex, et à 10 % pour un triplex ou un quadruplex. Comme tout prêt avec moins de 20 % de mise de fonds, votre emprunt devra dans ce cas être assuré par la SCHL.
Le niveau de rentabilité potentiel de l’immeuble
En évaluant cette donnée, votre institution financière mesure votre capacité à payer vos versements hypothécaires. Les méthodes de calcul des différents prêteurs sont assez semblables, et consistent généralement à comparer les revenus potentiels de l’immeuble avec les dépenses d’exploitation qu’il engendre et le remboursement du prêt hypothécaire.
Votre dossier de crédit
Votre «santé financière» joue un rôle primordial dans la décision du prêteur. Chez Desjardins, par exemple, vos différents engagements financiers ne peuvent dépasser 35 % de vos revenus bruts. Et bien entendu, si les retards de paiement sont une habitude chez vous, cela ne jouera pas en votre faveur…
«Ce qui fait souvent défaut, au départ, ce sont les liquidités pour payer les différents coûts d’acquisition tels que la “taxe de bienvenue” [droits de mutation], les frais de déménagement et de branchement de différents services, etc.», prévient Giuseppe Perna, directeur du développement hypothécaire à la Banque Nationale. Si le budget est trop serré et qu’un pépin survient, qu’allez-vous faire? Selon lui, prévoir 3,5 % du montant du prêt hypothécaire pour les frais de démarrage offre une bonne marge de manœuvre.
Les déductions fiscales sont nombreuses pour le propriétaire d’un immeuble locatif. Intérêts du prêt hypothécaire, impôts fonciers, frais de gestion… Mais il ne faut pas perdre de vue que vos revenus de location s’ajoutent à vos revenus d’emploi; vous avez donc tout intérêt à planifier leur impact potentiel avec un comptable ou un planificateur financier pour voir si le jeu en vaut la chandelle.
À LUNDI PROCHAIN!
Source: protégez-vous.ca